Entretien pour lelitteraire.com

Source : lelitteraire.com

Entretien express pour lelitteraire.com à lire ici. Merci à Jean-Paul Gavard-Perret.

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Les responsabilités.

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Ils ont muté en matière recy­clable ou en souvenirs.

A quoi avez-vous renoncé ?
Aux grasses matinées.

D’où venez-vous ?
Là, de suite, de chez l’épicier. Sinon de Dijon.

Qu’avez-vous reçu en dot ?
Je ne sais pas.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
Café, bière, ver­veine, musique au casque.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres poètes ?
Théo­ri­que­ment rien : cha­cun fait ce qu’il a à faire.

Quelle est la pre­mière image qui vous inter­pella ?
Mes mains sur un piano.

Et votre pre­mière lec­ture ?
Ce que j’aimais lire enfant ? “Copain des bois” ! Et d’autres livres sur la pêche, la mon­tagne ou l’archéologie. Mais pas beau­coup de lit­té­ra­ture. Je n’aimais pas les histoires.

Quelles musiques écoutez-vous ?
Du rap essen­tiel­le­ment, amé­ri­cain majo­ri­tai­re­ment, depuis le jour où à douze ou treize ans j’ai entendu pour la pre­mière fois à la radio le mor­ceau “Affir­ma­tive action” de Nas. Je ne me suis jamais remis de l’entrée de la caisse claire dans le cou­plet du rap­peur AZ. La même année, 1996, je me pre­nais dans la tronche l’album The Score des Fugees. C’était fini. On ne se sent plus jamais seul en écou­tant de la musique dont les artistes qui la font s’adressent à toi sans 4e mur en mode moi-je-ici-et-maintenant. Bref, l’autre amour de ma vie, c’est un truc que je n’ai pas vécu, le Vel­vet Under­ground. Et j’ai quand-même une grosse par­tie de mon cer­veau grillé par le rock et la pop : TV on the radio, The Kinks, Eels, Beck, Ramona Cor­dova, Bowie, Adam Green, les pre­miers Strokes ou Arcade Fire…

Quel est le livre que vous aimez relire ?
Je n’ai pas de livre monu­ment de che­vet de la mort qui tue. Je relis le plus sou­vent les recueils des copains, et ceux de Dan Fante ou d’Aimé Césaire….

Quel film vous fait pleu­rer ?
Je ne m’en sou­viens plus. Ça fait des lustres que je ne me suis pas posé devant un bon film.

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
Ben… moi. Sinon c’est pas un miroir, mais une télé. Ou un miroir de film d’épouvante.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Tiens, je n’ai jamais eu ce sen­ti­ment. Per­sonne je crois. Je crois que si on n’ose pas, c’est que ce n’est pas le moment, que la parole n’est pas entiè­re­ment formulée.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
New York.

Quels sont les artistes et écri­vains dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Je ne sais pas. Je ne me sens pas proche des artistes dont j’admire le tra­vail. J’ai ten­dance à cher­cher autre chose.

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
Du temps, de la tran­quillité et un lec­teur CD avec un adap­ta­teur Bluetooth.

Que défendez-vous ?
Mon assiette.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Que je ne suis pas qua­li­fié pour répondre.

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
Que répondre au pif sans connaître la ques­tion est une manière stu­pide de cher­cher les embrouilles.

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Quel est le meilleur album de A Tribe Cal­led Quest : Low end theory, Mid­night marau­ders ou We Got It from Here… Thank You 4 Your Service ?

Entre­tien et pré­sen­ta­tion réa­li­sés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 27 juin 2019.

 

Aimé Césaire « nouvelle bonté »

nouvelle bonté Wifredo Lam collection privée © ADAGP, Paris 2011 / © collection privée

 

il n’est pas question de livrer le monde aux assassins
d’aube

la vie-mort
la mort-vie

les souffleteurs de crépuscule
les routes pendent à leur cou d’écorcheurs
comme des chaussures trop neuves
il ne peut s’agir de déroute
seuls les panneaux ont été de nuit escamotés
pour le reste
des chevaux qui n’ont laissé sur le sol
que leurs empreintes furieuses
des mufles braqués de sang lapé
le dégainement des couteaux de justice
et des cornes inspirées
des oiseaux vampires tout bec allumé
se jouant des apparences
mais aussi des seins qui allaitent des rivières
et les calebasses douces au creux des mains d’offrande

une nouvelle bonté ne cesse de croître à l’horizon

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Poème écrit à partir du tableau nouvelle bonté de Wifredo Lam, extrait de Moi, laminaire…