Amar derrière le bar du Saint-Nic rue Jean-Jacques
nous a toutes et tous entendu
Lire nos poèmes lors des scènes ouvertes
Édition, bourse, manuscrit, lecture-performance, lectorat, n’existaient pas dans nos avenirs
Ces mots n’avaient pas été conçus alors on s’organisait
Faisant les choses comme on pouvait
Avec qui on voulait
Les flyers étaient soigneusement déposés dans les meilleures boulangeries et on s’essayait à Facebook.
On écrivait, on déclamait
On s’écoutait, on applaudissait
Il y avait tous les âges et toutes les écritures
On se donnait de la force même si c’était nul
On disait parfois bof parce que c’était bof
On admirait quand c’était génial, parfois avec une pointe de jalousie alors qu’il ou elle venait de plier la salle. Le premier réflexe était de vite rentrer chez soi pour écrire un nouveau texte pour la scène du mois prochain.
Toute mauvaise énergie, toute mauvaise intention de la part d’un client bruyant arrivé là par hasard qui, découvrant nos soirées, s’opposait en commentant à voix haute nos prestations, était rapidement envahi par un fumet d’ondes positives qui lui faisait fermer sa gueule dans les dix minutes. C’était beau, puissant et sans heurt.
La scène finie, la clientèle partie, certaines soirées se terminaient tard dans la nuit, derrière le rideau baissé, la municipale passant tout près, on continuait en cercle, certains au beatbox, d’autres au chant, on se taxait des roulées en disant à l’autre qu’on l’aimait.