Suite du ramonage poético-feuilletonné écrit en correspondance avec Grégoire Damon à suivre sur nos blogs respectifs. D’ailleurs, l’épisode précédent c’est sur le sien.
201) La génitrice a refait l’appart’. Nouvelle disposition des meubles. Dans la cuisine et la chambre. Pour limiter la marinade et créer de nouveaux gestes. De nouveaux déplacements dans l’appart. Histoire de se rallumer. J’suis rentré après 2 jours passés à être ailleurs. Loin du un jour plus un jour plus un jour habituel.
202) D’ailleurs, c’est assez flippant d’habiter le quotidien quand on n’est que de passage. On s’investit différemment sur le tapis roulant d’une correspondance que sur le tapis de jeu des gnocchis. La démarche n’est pas la même. La manière de saluer non plus. On repart anormalement plus triste après un adieu, qu’après un « à ce soir » lancé à sa conjointe ou conjoint. Ça ne devrait pas.
203) On devrait à chaque seconde pleurer les ancres comme les paquebots le font au Cap Horn.
204) Prévoir VRAIMENT une journée ? Il y a des gestes et des flux. Mais ce qu’on sait de la matière qui tient tout ça… L’autre jour à travers ma fenêtre j’ai cligné de l’œil, une mouette est passée. J’ai bu une gorgée de thé, j’ai entendu un klaxon. Je me grattais l’épaule quand un cycliste freinait. Un nuage passe et je m’assois.
205) L’effet parenthèse des voyages ponctuels réveille souvent le lyrisme gluant des quais de gares. Puis on revient avec des fausses prophéties dans les baskets ou de la philosophie recyclée.
206) « Partir ne prend du sens que si on est centré » ai-je entendu déborder de l’écouteur du type collé à moi à l’heure de pointe. Woua, c’que tu m’en apprends des choses.
207) Puis rentrer donc. Dans l’appart’ neuf du chez soi. Vitalisant. Tant de nouvelles habitudes à inventer. De régimes à imposer. Et ce n’est pas si simple. Y’a comme des méandres devant. J’ai toujours préféré suivre du doigt les fleuves sur les cartes plutôt que tracer un trait entre deux côtes.
208) Un matin, l’engouement populiste de la nouveauté s’est vaporisé par la VMC. Les gestes, eux, sont toujours là. Mais on ne les habite plus. Ils sont trop forts. Et nous fragiles. L’équilibre est rompu. Alors on déplace les meubles. Ou bien on remplace la machine à expresso par une cafetière à l’italienne.